Rédigée par Fatou Y.  / Mise en page par David D. Temps de lecture 26 mn.

Matou : « Je trouve que l’une des facettes du métier qui est magnifique, c’est de pouvoir aider les gens avec l’art »

Vous l’avez sûrement vu sur les scènes de Chilla, KIK ou encore PLK, un grand barbu talentueux qui donne une énergie exceptionnelle dans les salles. Cet homme, c’est Matou. Il est DJ, compositeur et violoncelliste. Un homme au multiple talents et au cœur immense, voilà ce qui définit cet artiste qui nous parle aujourd’hui de son projet Elixir volume 2 ainsi que de son premier concert à la Cigale qui aura lieu le 20 novembre 2024.

©Streetchiwa 

DansLaCiudad : Le violoncelle, c’est un truc de fou mais du coup, quel est ton rapport avec la musique et comment es-tu rentré dedans ?

MATOU : Je suis violoncelliste de formation, donc instrumentiste classique. J’ai fait des cours particuliers, parce qu’à 3 ans, t’es trop petit pour rentrer au conservatoire. J’y suis entré à l’âge de 6 ans. J’ai fait tout mon cursus au conservatoire. Je suis rentré dans un collège à horaires aménagés, qui s’appelle l’École des Enfants du Spectacle, au Collège Rognoni. J’avais cours que le matin, et l’après-midi j’étais libre pour faire mes heures de conservatoire, travailler mon instrument et ma musique. J’avais beaucoup, beaucoup d’heures de conservatoire. Et à côté de ça, quand je suis arrivé au lycée, j’ai rebasculé sur un lycée général, option musique. J’ai passé un bac littéraire option musique. J’ai fait la fac Paris 4, La Sorbonne en musicologie. Puis j’ai commencé à travailler mes projets perso, à composer avec les outils de MAO.

Pourquoi le violoncelle précisément ? D’habitude, c’est la guitare, le piano. Le violoncelle, ce n’est pas forcément commun. ?

Pourquoi le violoncelle ? Mon père m’avait mis tout petit à l’éveil musical. Là où on apprend à taper des mains en rythme et à apprendre le nom des instruments. Et quand j’avais 3 ans je suis allé au marché avec mon père et il y avait un groupe de jazz qui jouait. Il y avait un contrebassiste. J’ai regardé le groupe de jazz jouer et j’ai dit à mon père, en pointant la contrebasse, « je veux jouer de la contrebasse ». Mon père m’a dit c’est pas possible, la contrebasse c’est trop gros. Comme je connaissais le nom des instruments, je lui ai dit, dans l’ordre de la famille des cordes, celui juste en dessous de la contrebasse, c’est le violoncelle. Je lui ai dit, je veux faire du violoncelle. Pendant un mois et demi, deux mois, tous les jours, je lui ai répété, je veux faire du violoncelle. Au bout d’un moment, il s’est dit, peut-être qu’il a vraiment envie. Il s’est démerdé et il a trouvé un quart de violoncelle, ce qui est à peine plus grand qu’un alto. J’étais trop jeune pour rentrer au conservatoire, donc il a trouvé une prof particulière. J’ai commencé et je n’ai jamais arrêté.

«Il y avait aussi un truc d’opposition avec mon père qui est un rockeur…»

Mais du coup, qu’est-ce qui a fait que tu as eu le déclic de faire du rap ton métier ?

La musique, c’est toute ma vie. J’ai commencé le violoncelle à l’âge de 3 ans, j’ai pas de souvenirs sans violoncelle. Du coup, je n’ai pas de souvenirs sans musique. La chose qui était sûre, c’est que la musique, c’est ma vie, c’est ce que je voulais faire. J’écoute de tout mais majoritairement du rap. Je pense que c’est générationnel d’une part. Je suis d’une époque où c’est le rap. C’est ça que je partageais avec mes potes. Il y avait aussi un truc d’opposition avec mon père qui est un rockeur. Il avait un label de punk underground quand il était jeune. C’est vrai que je me suis construit en opposition. Mais en grandissant, tu mûris. Tu te rends compte qu’il y a plein de trucs à découvrir. J’écoute aussi bien du rap, que du jazz, de la musique du monde, de la pop, du rock, du classique etc. Mais ce que j’écoutais le plus, ce qui me touchait le plus, c’était le rap et le hip-hop en général. Je pense que ça n’a jamais été vraiment calculé. C’est la vie qui a avancé et comme j’étais dans ce sens-là, ça allait aussi dans ce sens-là.

Tu es connu pour être DJ de plusieurs artistes notamment Chilla, KIK et PLK, mais comment es-tu rentré dans le monde du DJing ?

En gros, j’ai lâché la fac parce que je commençais à faire mes projets. Je composais beaucoup tout seul. J’ai compris qu’avec un ordi, un clavier, deux enceintes et une carte son, tu pouvais faire énormément de choses. À un moment donné, je me suis dit comment je peux faire tourner ma musique, mon nom avec les moyens que j’ai. Et à l’époque, je n’avais pas assez de matière pour faire un live de tous mes morceaux. Sachant que ça tournait surtout en live ou DJ set à ce moment. Du coup, je me suis dit que ça pourrait être intéressant que je t’apprenne à mixer. J’ai commencé à mixer tout seul, avec des potes. J’ai kiffé aussi ce délire-là. J’ai commencé à être DJ en club pour promouvoir ma musique et mon nom. J’ai écumé tous les clubs parisiens pendant un certain nombre d’années.

Un jour, mon cousin travaillait avec un artiste qui s’appelle Espiiem. Il m’a dit qu’il faudrait que je le rencontre. La vie a fait qu’on a réussi à se rencontrer. Ça a ultra matché tant humainement, artistiquement et musicalement dans nos discussions. Quelques mois après, il m’a dit « écoute j’ai une date parisienne à la Bellevilloise et j’ai plus de DJ, est-ce que toi ça te dirait d’être DJ pour moi ? ». Je lui ai dit « j’ai jamais fait ça mais let’s go, je suis super chaud ». Je l’ai fait et j’ai compris que c’était complètement autre chose, une autre énergie que le DJ en club mais ça m’a fait kiffer de ouf. C’est un souvenir mémorable. C’était fin 2014, que j’ai fait encore quelques dates avec lui puis une tournée. Et donc c’était en 2015 que j’ai fait ma première tournée. L’année prochaine, je vais donc fêter mes 10 ans de tournée. 

©Antonin N’kruma

Ça doit être un gros travail. C’est complètement différent de faire DJ en club que DJ pour un artiste dans ses concerts. Ça a dû être un gros bouleversement ?

Exactement, c’était une autre approche et moi je découvrais ça. Je kiffais de ouf et je continuais de composer à côté. Après, tout s’est enchaîné à partir de là. Espiiem a décidé à la fin de sa tournée et de la sortie de son album de partir sur autre chose. La création d’un studio et d’un label sur lequel il m’a signé. Il m’avait fait rencontrer plein d’artistes et d’acteurs du milieu dans le rap français. Pour ne pas me laisser tout seul le bec dans l’eau. Il m’a présenté Deen Burbigo. C’était à l’époque de son album Grand Cru. À ce moment-là, son DJ c’était et c’est toujours JayJay qui lui aussi était le DJ de Take a Mic. C’était le moment où Take a Mic commençait à bien marcher et il y avait beaucoup de dates avec Take a Mic et JayJay ne pouvait pas être là sur toutes les dates de Deen. Il m’avait appelé en remplacement en me disant du coup j’avais fait une grande partie de la tournée Grand Cru avec lui. C’était une autre expérience parce que c’était des salles un peu plus grosses. Il y avait l’aura du succès de l’Entourage. C’était super.

Et à ce moment-là, mon tourneur m’appelle en me disant « j’ai signé deux artistes qui n’ont pas de DJ, est-ce que t’es chaud ? » je dis bien évidemment, je suis super chaud. Le premier artiste s’appelle Aladin135 et le deuxième artiste Chilla. Pour la faire courte, j’ai rencontré les deux, ça match archi bien. Je pars en tournée avec les deux, Chilla, on ne s’est jamais arrêtées. Aladin, on fait la tournée de son projet Indigo. Après il me dit qu’il faisait partie du groupe Panama Bende que je connaissais bien et qu’il avait sorti un projet. Ils projetaient de partir en tournée et il m’a proposé de les suivre. J’ai rencontré les gars, ça s’est hyper bien passé. Je fais toute la tournée avec le Panama de l’album ADN. Parmi les 7 rappeurs, il y a un artiste qui s’appelle PLK qui en parallèle signé en solo avec Panenka et signe aussi pour une tournée et me propose de le suivre dans sa tournée et j’ai dit bien sûr et on ne s’est jamais arrêté.

« Après, j’ai fait la tournée africaine avec Youssoupha…»

C’est vrai que ça marchait bien sur scène, humainement et artistiquement. Du coup, avec Chi et Polak, ça ne s’est jamais arrêté. C’est ajouté des rencontres dont KIK, où quand on s’est rencontré ça a matché très rapidement. On a commencé à travailler ensemble d’abord en studio. On a fait un morceau pour moi et après j’ai travaillé pour lui. Et puis pareil il m’a dit qu’il allait en tournée et comme j’avais composé sur l’album, il m’a proposé de venir et c’est comme ça que je suis devenu DJ pour lui. Avec Youssoupha, il a son DJ légendaire, DJ Mist. Mist est également DJ pour d’autres artistes comme Niska, Keblack, Nasa. À côté de ça, il anime une émission sur Ado. Du coup, c’est vrai qu’il ne pouvait pas être partout donc Youss lui a dit « les dates où tu ne peux pas être là, je vais demander à quelqu’un de te remplacer » et il m’a appelé comme on se connaissait un peu. J’ai fait quelques dates en remplacement de Mist sur la tournée française. Après, j’ai fait la tournée africaine avec Youssoupha. Ça m’a permis de découvrir de nombreux pays de la meilleure des manières en y allant pour jouer de la musique. On a fait de belles choses.

Si on parle un peu du processus de création, c’est comment d’être en studio avec toi ? Comment tu t’organises ? Comment travailles-tu ? 

Ça dépend. Quand je suis en studio pour des artistes, que je compose pour eux pour leur projet, je m’adapte à leurs envies. Je travaille avec les compositeurs avec qui je peux être en studio. Pour mon projet perso, c’est un peu différent. Pour gagner du temps et optimiser l’énergie, en général, je compose tout de mon côté et j’arrive avec une grande palette de propositions. En général, une trentaine de prods à proposer à l’artiste. Dans ces prods-là, que j’ai faites comme ça et des prods que j’ai faites en pensent en particulier à l’artiste que j’invite sur le projet en me disant que ça pourrait bien lui coller. Mais ce qui est génial, c’est que des fois, je vise juste et des fois, je vise complètement à côté. Le moment où je vais mettre la prod qui est vraiment faite pour cet artiste-là, des fois, il va pas du tout calculer en mode « vas-y change ». Mais je trouve ça plus intéressant parce que je vais me dire « ah tiens vers où on va aller du coup ». C’est presque plus intéressant.

Mais il y a de belles surprises dans ce genre de situation ?

Bien évidemment. Ce que je dis pour mon projet aux artistes que j’invite, c’est « fais-toi plaisir ». On en avait parlé avec HoussBad, moi, je veux que tu kiffes autant que je vais kiffer. Si aujourd’hui, tu es dans un mood où tu as envie de faire un truc en particulier ou en plus, vu que c’est mon projet, tu ne pourrais pas te permettre de faire sur ton projet à toi, ça serait bizarre bah en fait let’s go, fais-toi kiffer.

Est-ce que c’est toi, tu les laisses diriger ou tu as ta propre direction artistique et ils vont dans ce sens-là ?

Ils vont dans ce sens-là. Moi, je considère que sur mon projet, la ligne directrice c’est ma patte de composition. Vu que je compose tout seul sur mon projet, finalement, le fil rouge va être ma touche en tant que producteur. C’est ça qui va permettre de donner la ligne directrice et que derrière eux ils peuvent se permettre d’aller où ils veulent parce que ça sera forcément attaché à mon projet. Il y a même certains artistes qui disent « il y a un thème ». Pour le moment, il n’y a pas de thème mais pour le moment, le concept de mes projets Elixir, c’est de donner un espace de liberté créative autour de mes compositions.

Tu as plusieurs passions de basket, tu voyages, est-ce que ça t’inspire dans tes compositions ?

Oui, je pense. Tu me parles de voyage, c’est vrai que je suis quelqu’un qui a eu la chance de pouvoir pas mal voyager et encore plus avec mon métier maintenant. C’est une chance et un luxe et j’adore ça. Je pense que je me nourris aussi de ce que je vois et de ce que je découvre musicalement dans les pays où je peux aller. Dans toute ma carrière musicale, ce sont des choses qui m’influencent. Tu parles de sport, c’est vrai que dans le hip-hop le sport est souvent lié. C’est un truc de culture globale. Je suis musicien, c’est mon art, c’est mon travail, mon métier mais bien évidemment que je suis passionné par un truc à côté qui influe sur ce que je produis.

Au début de ta carrière tu as fait pas mal de projets qui regroupent tes compositions aujourd’hui tu as choisi d’être accompagné de magnifiques voix sur tes projets, peux-tu nous expliquer comment tu as franchi le cap d’accompagner tes prods avec différents artistes ?

C’est ultra simple. Au début, je faisais des petits EP, des petits projets. Il y a eu un projet un peu plus long, Dimension, qui a été construit différemment sur le format d’un album. Quand j’ai commencé à travailler avec des artistes, c’est venu très naturellement parce que je me suis dit que j’avais la chance d’être entouré d’artistes extrêmement talentueux. Pourquoi ne pas faire des morceaux ensemble ? Et pas forcément que pour eux. À la base, Elixir, c’est sans prétention. C’est un petit projet où je me dis que si je ne faisais pas un EP où je fais un morceau avec Chilla, un morceau avec Polak et je ramène quelqu’un d’autre et ça fait 3 morceaux et je sors un projet comme ça. Comme je suis en tournée en permanence, je suis en studio avec beaucoup d’artistes petit à petit, je tente des perches. Je dis « bah voilà, moi je suis sur un projet, est-ce que ça te dit ? » toujours dans l’humain. C’était plus un truc de se dire, voilà il y a une rencontre humaine, la rencontre humaine se passe bien, j’aime ce que cet artiste fait et peut-être que lui aussi, je te propose de travailler ensemble, si tu veux, tant mieux, si tu ne veux pas ce n’est pas grave n’y a pas de soucis.

Et en fait, petit à petit, dans le prisme des tournées, des studios, j’ai commencé à construire plein de morceaux, j’ai eu l’idée d’avoir des croisements inédits. Je me suis dit que Georgio par exemple il n’a jamais fait un feat avec Jok’air et ils m’ont dit qu’ils étaient chauds. Tu proposes et oui ça marche et du coup, je me retrouve avec un Jok’air feat Georgio, un Jazzy Bazz feat Mister V. Et d’un coup je me suis retrouvé avec un strike, je me suis dit « bah en fait là j’ai un album », et très vite je me suis lancé en trilogie, en me disant ça prend du temps, c’est fatigant mais une fois que tu l’as fait, il y a une satisfaction énorme.

Comment tu fais pour allier ce travail de composition pour ton projet, et le métier de DJ où tu es tout le temps partout, car tu suis des artistes qui ont beaucoup de dates dans l’année, ça doit être épuisant ?

C’est beaucoup de temps, après je considère qu’en tant que musicien, c’est toujours cool d’avoir plusieurs cordes à son arc. J’ai la casquette de DJ, la casquette de compositeur. En tant que DJ, je fais aussi bien du mix en club, que d’être sur scène avec des artistes. Dans la composition, je fais aussi de la musique à l’image, c’est quelque chose qui m’intéresse. Il faut juste se structurer, et souvent les tournées, sauf l’été avec les festivals, c’est un peu tout le temps mais souvent les concerts c’est rarement avant le jeudi, concrètement, si j’ai 3 dates dans la semaine, ça sera jeudi, vendredi, samedi, et le reste du temps j’ai le temps d’être en studio.

Mais est-ce que ça t’arrive de composer pendant que tu es dans le tourbus ?

Ça m’est arrivé, mais ce n’est pas ce que je préfère, il y a des gens qui arrivent très bien à faire ça, ça m’impressionne parfois, mais moi j’aime bien être dans mon mood, je suis en mood tourné et en mood studio. C’est deux moods qui pour moi sont différents, ils se complètent, c’est pour ça que je suis très heureux de faire les deux, mais j’aime bien être en mode, début de semaine, studio, compo et projet, et fin de semaine tournée. Comme ça, je profite bien des deux. Ça m’est arrivé d’être en tournée, d’avoir des trucs à gérer au dernier moment, pour mon projet, pour envoyer un piste par piste, t’es obligé des fois ça se croise.

S’il y a un volume 1 et 2, on peut imaginer qu’il y aura un volume 3, est-ce que tu as déjà des artistes en tête ?

J’ai déjà des idées d’artistes en tête. J’avais cette volonté sur le volume 2 de ne mettre aucun artiste présent sur le volume 1. C’était un peu un challenge un peu personnel que je me suis lancé un peu tout seul. En vrai c’était un peu des bâtons dans les roues parce qu’étant très proche de certains artistes, c’est aussi plus facile de leur demander de faire un morceau avec moi s’il le souhaite mais je voulais pas tomber dans un truc « on écoute les projets de Matou juste parce qu’il y a un morceau avec Chilla, PLK ou KIK ». Je voulais pas tomber là-dedans, je voulais me challenger pour que ça soit autre chose et aller plus loin que ça.

En vrai, je suis content de l’avoir fait maintenant sur le volume 3, j’ai envie encore une fois d’avoir des artistes que j’ai eu sur aucun des deux volumes mais je ne m’interdis pas de faire des croisements entre tout le monde. Je ne m’interdis pas qu’un artiste du volume 2 en feat avec un artiste du volume 1. Tout est possible, je ne m’interdis rien. J’ai commencé à bosser déjà, j’ai des pistes, ça avance bien et j’espère que ça prendra moins de temps que ça a pris entre le volume 1 et le volume 2. Après je ne précipite pas les choses parce que je préfère toujours privilégier la qualité à la rapidité d’exécution et c’est des projets qui prennent du temps à construire.

D’ailleurs pourquoi as-tu choisi le titre Elixir ?

En gros quand j’ai commencé à sortir des projets, j’aimais bien le concept de projet par ordre alphabétique. Mon premier projet s’appelle Aphelion, le deuxième EP Brahman, troisième projet, Conversations, quatrième projet Dimensions. Et donc quand j’étais arrivé à Elixir, c’était le E. Quand j’ai commencé à composer Elixir et à réfléchir au titre du projet, je me suis dit qu’il fallait que je trouve un mot en E que je ne trouvais pas. J’ai fait des recherches et je suis tombé sur le mot élixir, je trouvais ça super beau et en plus de ça c’est ultra intéressant parce que c’est un peu moi qui vais concocter un élixir, c’est moi qui vais proposer à tel artiste de collaborer avec un autre donc je suis un peu comme un druide qui va concocter ses potions. C’est un peu comme ça qu’est né Elixir.

Est-ce que produire ses projets fait partie d’un processus ou tu veux arrêter le DJing pour produire plus d’albums ou est-ce juste une manière pour toi de faire deux choses que tu aimes sans forcément en abandonner une ?

Pour moi, le studio et la scène, c’est deux choses que j’aime. J’adore être en studio avec les artistes ou même parfois seul quand je compose, crée, c’est des moments ultra fort, beau et intéressant. Et puis après l’énergie de la scène ça n’a rien à voir. Je ne peux pas choisir entre mon père et ma mère et là c’est un peu ça, j’aime autant les deux donc en vrai, je n’ai pas fait l’un pour arrêter l’autre, c’est vraiment deux choses qui sont complémentaires pour moi. En tant qu’artiste, musicien c’est toujours cool d’avoir plusieurs cordes à son arc et moi j’ai la chance et l’opportunité de pouvoir faire les deux.

Tu as annoncé un concert, Matou + friends à la Cigale le 20 novembre prochain, comment t’es venu l’idée de faire ton propre concert ?

C’est mes tourneurs qui m’ont dit « t’a déjà pensé à faire une date parisienne ? », j’ai dit oui bien sûr, on y pense mais bon voilà et ils m’ont dit « bah bien on y pense ensemble ». Une semaine après la Cigale a été programmée. En toute honnêteté j’ai du mal à réaliser, je suis super heureux et je veux vraiment faire en sorte de proposer un vrai beau moment de divertissement parce qu’il y a beaucoup de gens qui prennent leur place et beaucoup de gens qui sont un peu plus frileux parce qu’ils ne savent pas vraiment ce que ça va être ce concert ce qui est normal. Parce qu’y en a beaucoup qui me voient surtout en DJ et qui se disent que ça va forcément être du DJ set.

Mais sans spoiler, ça va être un vrai moment de partage et de fête. Donc il y aura bien évidemment des guests, on jouera bien évidemment les morceaux d’Elixir. Je veux faire en sorte qu’il y est tous les ingrédients qui font qu’on passe une bonne soirée. Pour moi les ingrédients d’une bonne soirée c’est faire la fête, turn up, avoir des moments plus d’émotions, je veux qu’il y ait des choses où les gens peuvent sourire c’est important pour passer une bonne soirée. D’avoir aussi l’occasion de voir plein d’artistes que tu kiffes donc voilà, il y a plein d’éléments comme ça que j’ai envie de mettre dans ce show pour que ce soit plus qu’un simple concert mais un vrai moment de fête, de partage.  

Pour toi, qu’est-ce qui fait la beauté de ton métier ?

Tellement de choses, je pourrais dire énormément de choses parce que je considère que c’est une chance et un luxe de vivre de ma passion donc rien que ça c’est déjà énorme. Je vais donner un exemple qui m’a fait prendre conscience après quasiment 10 ans de tournée de l’impact parfois de mon métier. Avec Youssoupha, on a fait un concert l’année dernière au Tchad qui est un pays en guerre depuis plusieurs années et on a été booké pour jouer à un festival à N’Djamena, la capitale du Tchad.

Je suis arrivé dans cette ville avec des murs criblés de traces de balles et de bombardements, là où 3 mois avant que j’arrive il y avait un couvre-feu à 19h. Là, c’était un grand festival sur une des grandes places de la ville. C’était incroyable et quand on s’est retrouvé sur scène, j’ai vu cette énergie et les gens du public qui ont connu la guerre toute leur vie pour la plupart, se transcender face à la musique de Youssoupha et être tellement heureux de vivre ce moment-là, il y avait une énergie qui m’a presque foutu les larmes aux yeux. J’ai eu beaucoup de monde devant moi et cette énergie où je sens que ça les fait sortir de ça et qu’ils ont besoin d’extérioriser, d’évacuer ce truc-là. Je me suis dit ce qu’on fait, ça sert. Parce que des fois on peut se dire que la musique c’est de l’art, c’est pour une niche et des fois on peut même se questionner en tant qu’artiste « est-ce que je sers vraiment à quelque chose dans la société ? ». Et là j’ai vu que oui.

Je donne un exemple extrême mais ça arrive de recevoir des messages sur les réseaux de personnes du publique qui te disent « ton morceau m’a énormément aidé, j’ai passé un moment difficile dans ma vie et ça m’a aidé à traverser ce moment. Ton morceau m’a donné beaucoup de force ». Je trouve que c’est une des très nombreuses facettes du métier que je fais qui est magnifique. C’est de pouvoir aider les gens avec l’art.  

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