Rédigée par Fatou Y. / Mise en page par David D. Temps de lecture 19 mn.

Producteur, guitariste et chanteur, Oscar Emch, artiste talentueux du R&B français dévoile le 7 mars dernier, son tout premier album Ma voix.

Un projet dans lequel il partage tendrement son parcours et apporte espoir et enthousiasme à travers des productions étincelantes.

Pour l’occasion, DansLaCiudad est parti à sa rencontre pour discuter de la récente sortie de son projet.

DansLaCiudad : Est-ce que tu pourrais te présenter pour ceux qui ne te connaîtraient pas ?

Oscar Emch  : Moi, je m’appelle Oscar Emch. Je suis chanteur, producteur et multi-instrumentiste. J’ai commencé à faire du R&B autour de 2019. J’ai commencé un peu à écrire mes propres morceaux en français et à produire pour Enchanté Julia, puis pour Luidji et Prince Waly les années qui ont suivi. J’ai déjà sorti deux EPs, Portrait craché en 2020, Respire (bye bye) en 2022.

Et là je viens de sortir mon premier album Ma voix.

©Thomas Fliche 

Comment es-tu rentré dans la musique ? Qu’est-ce qui t’as décidé à te lancer ?

C’était la guitare. Je voulais imiter un pote qui en faisait aussi, j’avais 13 ans. Donc j’ai commencé à apprendre un peu des morceaux de rock et, très vite, je me suis intéressé au jazz. D’abord au jazz manouche, parce que c’était l’époque.

Vers 2010, c’était le centenaire de Django Reinhardt. Du coup il y avait un renouveau jazz manouche. Petit à petit ça m’a fait aller vers des études de musique, au conservatoire de jazz, où j’ai principalement fait de la guitare. Puis j’ai eu envie de chanter, donc j’ai bifurqué après mes 18-20 ans. Mais ça m’a pris pas mal de temps. J’ai d’abord créé en anglais, j’ai créé pour d’autres. Puis je me suis mis à faire du français et à me dire que j’allais moi-même chanter.

Pourquoi as-tu choisi d’adopter le R&B alors que tu avais fait tout ce parcours dans le jazz ?

Je pense que mes goûts ont pas mal évolué.

En sortant d’un parcours un peu plus institutionnel, ça m’a permis de m’ouvrir aussi à d’autres choses. Parce que je venais d’un milieu, quand j’ai fait mes études, qui étaient très instrumentistes, très musiciens. Il y avait un peu une figure mythe du virtuose instrumentiste comme il y a dans le jazz, comme Miles Davis, John Coltrane… Je sentais que j’avais envie d’aller vers là, mais c’est pour ça que ça a pris du temps aussi. C’est une filiation logique aussi. Du jazz vers D’Angelo, en passant par Prince. C’est juste que j’ai fait le chemin un peu inverse. Plutôt que de partir de Franck Ocean et de redescendre jusqu’au jazz, j’ai fait l’inverse.

«…. je vais faire des sons stylés et faire un peu le lover …»

Le R&B se pratique lorsqu’on a une certaine sensibilité, quel regard portes-tu sur ce style musical et à la musique en général ?

Je ne sais pas si c’est un truc que j’aurais pu faire dans un autre style, peut-être que si. En tout cas, j’avais envie avec mon premier album d’aborder des thèmes beaucoup plus personnels, de parler de mes proches, de ma famille et de comment j’ai grandi dans la maison familiale avec trois générations.

Mais de base, j’abordais le R&B en mode « je vais faire des sons stylés et faire un peu le lover ».

Petit à petit, j’ai amené de la profondeur, parce que je me suis rendu compte que ce personnage, un peu à la Chris Brown, à la Brent Faiyaz, ce n’était pas à moi. C’est pour ça que les artistes, comme Frank Ocean et Dijon, sont aussi cool. Parce que c’est l’autre penchant du R&B, plus introspectif et plus mystérieux. Ma sensibilité par rapport à cette musique-là, c’est ce truc aussi de m’assumer comme je suis. Par exemple, de parler d’amour de manière positive, honnête, de comment je vis les choses, et de ne pas forcément me mettre dans le rôle d’un artiste stylé. 

Tu disais que tu étais producteur pour Enchantée Julia, Luidji et plein d’autres artistes. Qu’est-ce que cette casquette a apporté en plus à ta musique ?

Pas mal de confiance, je pense. Parce que déjà le fait qu’une artiste comme Enchantée Julia ou qu’un artiste comme Luidji, que j’adore vraiment premier degré, c’est vraiment la musique que j’aime, ils ont posé le tampon dessus, genre « c’est bien ce que tu fais, on le prend pour nous ».

Avec Enchantée Julia, ce qui est cool, c’est qu’on a aussi sorti nos projets un peu simultanément. On s’est vu grandir, on s’est aidé un peu en même temps.

Et avec Luidji, j’ai pu bosser sur son dernier album à un moment où j’avais moi-même envie de faire un album, mais je ne savais pas par où commencer.

J’avais fait que des EP, qui sont des projets plus courts, et j’avais encore cette pudeur de ne pas forcément parler de manière trop incarnée de ce que je vivais. Parce que justement, j’étais beaucoup sur l’instrumental et je n’avais pas forcément beaucoup travaillé ma plume. Et là, j’ai essayé de faire l’inverse. Voir comment il abordait les choses, parce qu’il n’est pas producteur, ni instrumentiste. C’est vraiment l’histoire avant tout.

Je me suis aussi dit que pour me reconnaître dans cette image d’artiste et être cohérent avec moi-même, il fallait que je passe du temps à comprendre quelle était l’histoire que je voulais raconter. Et ensuite, je verrai bien quelle musique pourrait accompagner tout ça. Finalement, je crois que ça m’a permis d’aborder la création par l’autre sens, plutôt par le texte et par l’histoire.

Ton premier album Ma Voix est sorti, est-ce que tu peux nous parler de l’univers de ce projet ?

Ça parle beaucoup de grandir et de prendre confiance en soi. C’est un album qui s’appelle Ma voix parce que dans le déroulé de l’album, il y a une histoire un peu sous-jacente qui est celle de mon apprentissage du chant, qui est profondément liée à l’image que j’ai de moi-même. Parce que lorsque j’étais petit, je pense qu’il y a des choses qui ont fait que j’avais un blocage émotionnel et que je ne pouvais pas m’exprimer en public, je bégayais.

Ma voix, pour moi, c’était un obstacle à ma sociabilité et à mon bonheur. C’est quelque chose qui m’empêchait d’être avec les gens. C’est aussi ce qui a fait que j’ai mis longtemps à m’assumer en tant que chanteur. Et ces dernières années, avec mon projet et le fait de me dire que j’ai envie de devenir chanteur et de raconter mon histoire, j’ai aussi pris des cours de chant. Ces cours m’ont permis d’y croire, de me dire que je pouvais utiliser ma voix. Donc, c’est cette quête de l’acceptation de soi qui, pour moi, est à la fois archi intime et archi visible. C’est un peu bizarre, c’est une double face. J’ai aucun souci avec le fait de raconter ma vie, parce que j’ai l’impression que de toute façon, c’est déjà dans ma musique.

Pour les autres thèmes, je voulais parler de comment j’ai grandi avec ma mère, ma sœur et mes grands-parents paternels, mais sans mon père, qui est mort quand j’étais très jeune. Et je voulais raconter ça, toutes mes relations, qu’elles soient amoureuses ou filiales, mais d’une manière positive. Parce que c’est vrai que dans le R&B, il y a aussi ce truc parfois de tragédie et qui, moi, au final, ne correspond pas à ce que j’ai vécu.

J’avais envie de faire de la musique aussi qui puisse aider. Pas juste exprimer de la douleur, mais aussi exprimer de l’espoir et de l’optimisme.

©Thomas Fliche

« Ne reste jamais seul » c’est quelque chose que tu dis dans le titre Lowkey. La solitude est une chose qui te fait peur ?

Je suis quelqu’un d’assez solitaire en vrai, parce que j’ai besoin de beaucoup de temps tout seul pour créer aussi.

Mais toutes les choses qui m’ont permis de débloquer ce qui n’allait pas, c’était aussi le fait d’avoir du soutien autour de moi. Et cet album, on a essayé de le faire de manière beaucoup plus collaborative. J’ai passé beaucoup moins de temps tout seul chez moi avec mon ordi. On a fait participer des musiciens. Puis, on a été beaucoup plus nombreux à travailler, pas forcément musicalement, mais aussi sur l’entourage professionnel.

Donc c’est pas dans le sens qu’il faut absolument toujours être accompagné, mais plutôt : reste pas tout seul avec tes problèmes. C’est-à-dire qu’il y a un moment donné où tu as besoin des gens pour te sentir bien et pour pouvoir lâcher du poids.

On parlait de cet exercice de se livrer, ça n’a pas été trop difficile pour toi de coucher toutes ces choses personnelles ?

Ça a été difficile de trouver les bonnes histoires, de trouver les bons souvenirs et de mettre des mots dessus. Au final, je crois que j’ai assez vite accepté le fait de me livrer comme ça. J’ai aussi envie d’avoir ça, de pouvoir l’offrir à mes proches. Le morceau Mumu, c’est sur ma copine, et je voulais qu’elle le sache. De base, je me suis dit que ça allait peut-être être un peu gênant. D’autant plus que tu ne sais pas combien de temps ça dure. Peut-être qu’un jour, tu vas être gênée, mais je me suis dit que je préférerais ça et que ce soit beau, que ce soit un bon souvenir.

©Leila Cab

Si tu pouvais adresser quelques mots à ton toi petit, qu’est-ce que tu lui dirais ?

C’est vraiment le morceau Les moyens, tu n’as pas besoin de plaire à tout le monde. C’était vraiment un enjeu de ouf, de me trouver. Parce que je voulais être virtuose de la guitare, trop bien chanter, composer tous les trucs moi-même. Je voulais tout faire en fait. Je pense que c’est une bonne chose. Mais il faut que tu acceptes aussi, quand tu prends ce chemin-là, que ça va être long. Que potentiellement, tu vas mettre beaucoup d’énergie, et que tu risques de te retrouver seul.

Ce truc-là, de ne pas essayer de plaire à tout le monde, mais plutôt d’essayer de trouver son propre truc et de le faire le mieux possible. Je pense que quand on fait de la musique, on est sensible aussi à comment les gens vont le prendre.

Et on a vite fait d’essayer de se conformer à des choses qu’on imagine plaire, plutôt que d’essayer de trouver quelque chose de très original. 

Un petit mot pour la fin ?

J’invite tout le monde à écouter l’album et à me dire ce qu’ils en pensent. J’ai hâte d’avoir les retours du public et j’invite aussi tout le monde à venir à la Maroquinerie le 11 avril.

 

Retrouvez Oscar Emch à la Maroquinerie Paris, le 11 avril prochain. La billetterie est disponible ici

©DICE

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