©Charlotte Steppé (insta : @cha.step)

« Pour aimer ma musique, il faut aimer pleurer en dansant »

Mélangeant énergie et mélancolie, joie et tristesse, amour et violence, l’univers d’ADÉS THE PLANET se construit autour d’une dualité qui rend sa musique addictive, elle résonne dans les têtes.

Afin de mieux la découvrir, nous avons discuté avec cette artiste à la musique si spéciale. De ses débuts dans la musique, en pleine pandémie, à la création de son dernier projet UN TRÈS BEL ENTERREMENT, ADÉS nous a partagé sa vision et s’est livrée avec authenticité, à l’image de ses compositions.

Rédigée par Éline H.  / Mise en page par David D.

DansLaCiudad : Dans “Prison” tu dis “T’écoutes mes sons mais tu sais pas qui je suis moi”. Ma première question est donc qui es-tu ?

ADÉS THE PLANET : Je suis Adé, c’est comme ça que j’aime qu’on m’appelle.

Pourquoi “ADÉS THE PLANET” ?

“ADÉS” c’est le mélange de mes deux prénoms. En général on m’appelle Adé, mais ce nom était déjà pris à l’époque, donc j’ai décidé de rajouter le “s” à la fin, et ADÉS ça m’a plu. “THE PLANET” devait constituer tout ce qu’était ADÉS, réellement ce qu’il y a au plus profond de moi. ADÉS c’est moi et THE PLANET c’est tout ce qui me constitue.

Quand est-ce que tu as commencé à composer ?

J’ai commencé la musique il y a trois ans. C’était pendant le covid, c’était vraiment une période bizarre de ma vie. Après être partie en Espagne à 17 ans pour mes études, je suis allée en Belgique puis aux Etats-Unis pendant 4 ans. Lorsque je suis rentrée à Paris pour changer mon visa étudiant en permis de travail, ça a commencé à parler de covid et l’ambassade américaine a fermé les frontières. Je me suis alors demandé ce que je n’avais jamais fait et que j’aurais aimé faire toute ma vie. J’ai voulu apprendre à jouer du piano, à faire des sons. Je n’y connaissais rien mais je me suis acheté un synthé. J’apprends à composer de la musique comme ça, enfermée dans mon studio pendant le confinement.

Au bout de quelques mois j’ai décidé d’aller en Côte d’Ivoire. Mon vrai développement s’est passé là-bas. Mais la première année j’ai fait uniquement de la composition. C’est qu’une fois que j’ai commencé à faire des prod décentes que j’ai essayé de chanter dessus. J’ai alors commandé un micro et j’ai posé ma voix.

Avant ça tu ne faisais pas du tout de musique ?

Pas du tout. Je ne me considérais pas comme une artiste mais j’ai toujours eu une relation particulière avec le son. J’ai toujours fait de la musique mais dans ma tête, je composais sans cesse, mais c’est maintenant que je fais de la musique que je réalise. Mais je ne pense pas que j’étais prédestinée à ça. Ma vision de l’art a toujours été que c’est quelque chose qu’il faut faire à côté, que ce n’est pas quelque chose que je peux faire pour vivre. Donc toute ma vie j’ai fait des études, mais je ne me retrouvai dans rien, forcément.

©Charlotte Steppé (insta : @cha.step)

Tu as donc mis quatre ans avant de sortir ton premier projet JE PLEURE EN DANSANT. Pourquoi ce titre ?

Ce titre m’est venu quelques semaines avant la sortie de l’EP, mais en réalité c’est un peu une devise que je dis tout le temps. Je dis souvent que pour aimer ma musique, il faut aimer pleurer en dansant. C’est un peu triste et dansant à la fois.

«…c’est logique parce que ça me ressemble, c’est authentique. »

Je trouve qu’il y a une certaine dualité dans ce projet. Tu parles souvent d’amour, mais de manière très violente.

Quand tu regardes ton dernier clip ou ta DA en général, c’est très violent, très sombre. Elle est voulue cette dualité paradoxale ?

C’est totalement voulu, et c’est pour ça que le titre est parfait. Mais en même temps, ce n’était pas recherché, pas planifié. Lorsque j’écrivais ces sons, je ne pensais pas au titre ou à ce qui rentrerait dans un EP ou non. Mais c’est logique parce que ça me ressemble, c’est authentique.

On dit souvent de moi que je ne suis jamais vraiment au milieu, beaucoup des deux extrêmes. Donc c’est un reflet de moi.

Quelle est ta principale source d’inspiration ? L’amour revient beaucoup dans ce premier projet.

Je trouve que c’est très facile d’écrire sur l’amour. En tout cas, c’est un des thèmes qui me touchent le plus particulièrement. Quand j’ai commencé à écrire de la musique, c’était des chansons d’amour que j’écrivais. C’est ma facilité, ça sort naturellement. Mais je réfléchis aussi en termes de projet. Maintenant que je commence à sortir de la musique, j’essaye de trouver une cohérence, que ce soit dans la stratégie de sortie ou dans les histoires que je raconte. Je m’inspire donc aussi du thème du projet et de la suite logique de ADÉS THE PLANET dans son voyage sur Terre. Je vois vraiment ça comme une histoire, quelque chose de linéaire

Quelle est l’histoire que tu souhaites raconter dans tes sons ?

Pour l’instant je me vois encore comme une apprentie dans la musique. Donc je raconte mon expérience sur Terre ou dans cette industrie comme quelqu’un qui n’a jamais vécu ça auparavant, qui le vit pour la première fois. C’est pour ça que c’est intense, le choc initial. Je retrouve ça lorsque je relis mes lyrics. Donc pour l’instant mes histoires racontent la vie d’ADÉS, ce qu’elle voit et ce qu’elle vit. C’est aussi simple que ça. Mais l’histoire d’après ça je ne sais pas, je n’ai pas réfléchi aussi loin. C’est la musique qui drive le tout.

©Charlotte Steppé (insta : @cha.step)

«…authentique, ouverte et digitale.»

Comment est-ce que tu qualifierais ta musique ?

Authentique. C’est le mot qui me vient immédiatement. Lyricalement, je dirais qu’elle est ouverte, étrangement. Je n’ai pas le sentiment qu’elle est si nichée que ça. J’ai l’impression qu’elle est compréhensible pour tout le monde, et c’est quelque chose que j’apprécie dans les morceaux que j’ai sortis. Et enfin je dirais digitale. Tout est réalisé numériquement, dans ma musique et dans mes visuels. Donc authentique, ouverte et digitale. Mais j’ai toujours eu du mal à définir quelque chose, surtout ma musique.

Il y a beaucoup d’émotions et de couleurs différentes, c’est parfois sombre et parfois joyeux.

Je suis d’accord et c’est pour ça que je trouve le titre de ton dernier projet bien trouvé. On retrouve cette dualité, et le thème c’est vraiment de pleurer en dansant.

Oui c’est vraiment le thème de ma musique. Mes lyrics sont froids et mélancoliques, mais j’aime beaucoup la trap. Et mon deuxième EP s’appelle “Un très bel enterrement”, c’est aussi paradoxal.

De plus, dans JE PLEURE EN DANSANT je parle beaucoup de ce qui est liquide, des larmes, du sang, donc l’eau ; dans UN TRÈS BEL ENTERREMENT, je parle de la Terre. Il y a une certaine continuité.

Il n’y a aucun feat sur tes projets. Pourquoi ce choix ? Tu as prévu de collaborer avec d’autres artistes par la suite ?

Il n’y a aucun feat de prévu. Non pas que j’ai envie d’être sélective, mais parce que j’ai beaucoup de choses à raconter seule, et je n’ai jamais réussi à trouver de l’espace sur un track pour demander à un autre artiste de rentrer. Pour l’instant, c’est ADÉS qui raconte ses trucs.

«…je découvre aussi d’autres parties de moi…»

Quels sont tes morceaux préférés dans ta discographie ? 

« Prison », je l’aime trop. Ce track m’a appris beaucoup sur moi-même lorsque je l’ai fait et ça m’a donné envie de devenir encore plus forte, à maîtriser davantage la technique vocale. Ce son n’était pas facile à poser, il m’a donné envie de me challenger. Toute ma vie j’ai masqué la partie artistique de moi, donc c’est aujourd’hui une partie que j’apprends à découvrir. Et finalement je découvre aussi d’autres parties de moi qui se révèlent à travers ma musique et qui n’ont jamais eu d’espace pour parler. J’ai aujourd’hui cet espace pour être moi-même, et finalement « Prison » m’a appris sur moi-même.

« Bayas » également, pour une question d’affecte. Je ne dirais pas que c’est mon meilleur morceau, mais c’est le premier que j’ai écrit et c’est celui où je suis la plus vraie avec moi-même.

C’est à partir de là que j’ai commencé à accepter qui j’étais en tant qu’artiste.

©Charlotte Steppé (insta : @cha.step)

« J’ai cette volonté de livrer le son tel qu’il est

dans ma vision…. »

Tes morceaux sont souvent très déstructurés. Pourquoi ?

Oui je ne réfléchis pas aux structures. Ça énerve mes ingés-sons parce que mes prods n’ont pas de structure, il n’y a pas de loops c’est plus une progression, un one shot. J’ai cette volonté de livrer le son tel qu’il est dans ma vision. Je ne veux pas le plier pour que les gens puissent le consommer, je le fais pour moi.

Tu écoutes quoi en ce moment ?

En vrai, je n’écoute pas beaucoup de musique. J’en fait tellement que les rares fois où je n’ai pas du son dans les oreilles j’adore le silence, ça me fait du bien. Mais sinon depuis que je suis en France, je suis revenue il y a un an, j’ai beaucoup écouté ce qu’il se fait autour de moi, dans ma niche.

Récemment j’ai découvert Surprise, j’ai beaucoup aimé. J’ai également écouté le projet de Zinée que j’ai adoré. Celui d’Asinine aussi. J’ai découvert Ekloz sur scène.

Qu’est-ce que je peux te souhaiter ADÉS ?

La réussite dans tout ce que j’entreprends..

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